Historique
Histoire de l’abbaye de Léoncel : Venus de Bonnevaux, en Bas-Dauphiné viennois, douze moines de l’Ordre de Cîteaux s’installèrent en 1137 à Léoncel, dans un val du Vercors occidental, près des limites des évêchés de Die et de Valence.
Environnement
A 912 mètres d’altitude et à l’orée de la hêtraie-sapinière, le milieu naturel surprend, en dépit d’une situation aux confins des Alpes vertes du Nord et des Alpes de lumière, par une rudesse qu’attestent la longueur et la froidure de l’hiver, l’abondance des précipitations et de la couche neigeuse, la fréquence des brouillards et la violence des vents. En revanche la position montagnarde n’exclut pas les contacts. En effet, le val de Léoncel s’incline au nord vers le Royans et au sud vers la Vallée de la Gervanne, le col de la Bataille donne accès au Vercors central et oriental, et plusieurs “pas” et deux cols, ceux des Limouches et de Tourniol proches de l’abbaye, forcent les crêtes qui dominent la plaine de Valence et de Romans.
Au pied de versants raides et boisés, à proximité d’une source importante et à l’extrémité d’une petite plaine d’altitude, dont les marais donnent naissance au ruisseau de Léoncel, parfois dite “Petite Lyonne”, les Cisterciens aménagèrent un terre-plein sur lequel ils construisirent leur monastère. Non loin de là, au couchant, ils installèrent des bâtiments agricoles. On ne sait pas qui est à l’origine de la donation primitive de ces terrains, mais on conçoit aisément que des hommes voulant réaliser le “rêve cistercien” (Léon Pressouyre) aient aimé ce lieu écarté et sauvage. Ils devaient, en tout cas y demeurer six siècles et demi, jusqu’en 1790, puis y survivre par le souvenir.
Abbaye de Leoncel
Que reste-t-il des constructions monastiques ?
Le principal témoin de la longue présence cistercienne reste l’église abbatiale, construite avec des matériaux du voisinage, extraits des bancs de calcaire ugonien pour les parties basses et les parements extérieurs, ou taillés dans les tufs élaborés par les dépôts de calcite pour les parties hautes et notamment les voûtes. Entamée dès l’arrivée des moines, inachevée, en 1188, lors de la consécration du sanctuaire par l’archevêque de Vienne et l’évêque de Die, la construction se prolongea jusqu’au début du XIIIe siècle. De la première travée de la nef, près du carré du transept, on peut aisément constater l’évolution de la construction au cours d’une soixantaine d’années.
Le chœur
Avec la croisée du transept couverte d’une coupole sur trompes, avec des croisillons d’une grande simplicité, avec une abside oblongue et semi-circulaire à l’intérieur et deux absidioles en cul-de-four, le chœur relève d’un art roman imposant et dépouillé dans lequel on lit l’influence de la Provence.
La Nef
Encore romane, mais plus savante dans son élévation fondée sur la multiplication des porte-à-faux, la nef présente des signes d’une évolution discrète vers le style gothique. Les bas-côtés, voûtés en quart de cercle et dont les murs latéraux, renforcés par des arcatures aveugles ne présentent pas d’ouverture, s’ouvrent sur la nef principale par des arcs de décharge de tracé brisé, prenant appui sur des piliers carrés très massifs. Le vaisseau central, dont la voûte doit bien davantage aux puissants arcs doubleaux en plein cintre qu’aux moulures ogivales habillant et soulignant les arrêtes, apparaît élevé et bien éclairé par de hautes fenêtres cintrées, parées de colonnettes à chapiteaux, entre lesquelles les arcs doubleaux de la nef, les boudins, masquant les arrêtes et les plus hautes arcatures brisées reposent sur les consoles. Celles-ci soutenues par des colonnes engagées, s’ornent de chapiteaux caractéristiques de l’art cistercien. Ici se devinent des influences auvergnates et bourguignonnes.
Architecture
Les nombreuses restaurations furent toujours conduites dans le “droit-fil de l’art roman” (Francesco Flavigny). Aussi l’église de Léoncel apparaît-elle au visiteur très proche de ses origines, à l’intérieur comme à l’extérieur, même si la façade occidentale a été remaniée par l’ouverture d’une grande porte centrale et la fermeture des deux portes latérales, même si des contreforts tardifs renforcent le mur gouttereau nord, même si le beau clocher de type alpin, à deux étages et pyramide à huit pans, a été repris et renferme des chapiteaux de réemploi, non cisterciens. Il faut longer le mur nord et gagner l’extrémité de terre-plein pour admirer le chevet, contempler “l’impressionnant étagement de volumes” (Joëlle Tardieu) et voir l’extérieur polygonal de l’abside. Et c’est de la route du col de la Bataille que l’on a la plus belle vue sur l’église et les autres vestiges de l’abbaye.
Des bâtiments monastiques, l’enveloppe architecturale a été conservée. Mais à l’intérieur, fortement réaménagé par la commune, on ne retrouve que la galerie du chapitre, partie orientale du cloître. On peut voir, à toute heure, une des baies à ouvertures jumelées qui cantonnaient à l’entrée de la salle capitulaire médiévale, l’autre, comme l’armarium se trouvant dans la salle de la mairie. A l’évidence, des parties de murs anciens restent masquées par les maçonneries récentes, mais l’actuelle maison Saint-Hugues donne une idée de leur épaisseur. Seules des fouilles permettront de localiser le reste du cloître.
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Livret 1993 « Voir Léoncel : huit siècles cisterciens dans le Vercors » par les Amis de Léoncel.